Avant de vous expliquer plus en détail pourquoi l’homicide involontaire sur foetus est un sujet sur lequel le législateur doit évoluer, je veux réitérer mon profond soutien, et mes pensées à Angélique Kuberski et Valentin Stoock, les parents de la petite Jade. Ce couple, admirable de combativité, se bat pour faire reconnaître un homicide involontaire à la suite du décès in utero de Jade. J’ai l’honneur de les représenter dans ce combat. Je pense également à tous les parents qui connaissent cette souffrance.
Homicide involontaire sur fœtus : moins de droit qu’un animal
Pour bien comprendre la souffrance endurée par les parents et la nécessité de changer le statut juridique d’un enfant à naître sur le plan pénal, commençons par préciser qu’au moment où nous écrivons ces lignes, un fœtus a moins de droit qu’un animal sur le plan pénal !
En effet, aujourd’hui – et c’est fort heureux – la maltraitance envers les animaux est condamnée dans le code pénal ; mais pour ce qui est d’un enfant à naître, à quelques jours, ou même à seulement quelques minutes du terme, il n’est pas protégé pénalement.
En d’autres mots, et comme cela est expliqué dans la vidéo ci-dessous lors de l’intervention de votre avocat en homicide routier le 26 septembre au journal régional de France 3 Nord Pas-de-Calais, si l’enfant ne vit pas en dehors du ventre de sa maman, il n’a aucun droit. Sur un plan pénal. Il n’est rien. Ni personne ?
Le législateur doit évoluer sur l’homicide involontaire de l’enfant à naître
Aujourd’hui, le droit civil reconnaît, lui, l’enfant à naître, ce qui n’était pas le cas il y a quelques années. L’enfant à naître mort in utero n’était pas reconnu. Ce n’est plus le cas désormais. Cet enfant a un prénom et il est inscrit dans le livret de famille.
Si le droit civil a su évoluer, considérant l’injustice et la souffrance des parents, on peut alors légitimement se demander pourquoi le droit pénal n’a pas emprunté le même chemin. Il y a deux explications majeures à cela.
Jurisprudence homicide involontaire sur fœtus
La première raison est une jurisprudence sur l’homicide involontaire d’un fœtus de la Cour de cassation qui juge, depuis 2002 qu’un enfant à naître n’est pas « autrui ». Or, en droit pénal on ne peut tuer que « autrui ». Cette interprétation est hasardeuse. La Cour de Cassation a été livrée elle-même. En effet, le législateur n’a pas précisé qui était « autrui », alors qu’il doit édicter des règles très précises. C’est cela qu’il faudrait changer aujourd’hui, car si la loi ne change pas, la justice ne passera pas.
Et malheureusement, le rejet de la plainte pour homicide involontaire de mes clients par le Procureur d’Arras, impliquant de saisir un juge d’instruction qui devra lui aussi statuer, le démontre aujourd’hui.
C’est pour cela que la mobilisation pour faire changer la loi doit être forte. C’est la raison pour laquelle, j’invite – à la lumière des arguments développés ici – toutes les lectrices et tous les lecteurs de cette page qui veulent que la loi change et qu’un enfant à naître puisse être protégé sur le plan pénal, à signer la pétition lancée dans le cadre de cette affaire.
Fœtus en droit pénal et statut juridique : craintes de la remise en cause du droit à l’IVG
L’autre explication qui vient freiner l’évolution de la protection de l’enfant à naître sur le plan pénal, c’est la crainte d’une remise en question du droit à l’Interruption Volontaire de Grossesse. Comme expliqué dans cette autre vidéo ci-dessous, il n’est pas question de toucher à la loi sur l’IVG. Cependant, il est parfaitement possible de protéger ce droit auquel je suis attaché, et une révolution juridique. En se reposant sur les études scientifiques de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui indique qu’un fœtus de 22 semaines d’aménorrhée est capable de vivre en dehors du ventre de sa mère, il est possible de concilier l’IVG (14 semaines maximum) et la demande des parents.
Comment l’évolution en homicide involontaire du fœtus est possible sans toucher à l’IVG
Puisque, comme nous l’avons vu avec la vidéo qui précède, le fœtus n’est pas capable de vivre avant les 22 semaines d’aménorrhée, l’hypothèse d’une protection qui débuterait à partir de ce moment-là est tout à fait envisageable, protégeant ainsi l’IVG comme évoqué dans cette autre vidéo ci-dessous. Notons le cas échéant que le statut juridique du fœtus protégé en droit pénal interviendrait plusieurs semaines après le délai légal maximum de l’IVG, de 14 semaines.
S’il restera à se poser la question des interruptions médicales de grossesse – c’est au législateur de trouver le moyen de les autoriser sans que nul ne puisse être poursuivi -, la représentation nationale doit aujourd’hui entendre les souffrances des parents endeuillés par l’homicide involontaire du foetus en droit pénal, et évoluer comme il a su le faire en droit civil il y a plusieurs années. Le législateur doit permettre aux personnes qui vivent un tel traumatisme d’être reconnues victimes indirectes d’un homicide involontaire comme évoqué dans cette dernière vidéo cette fois-ci sur France Bleu.
Parce qu’une évolution est possible en s’appuyant sur les travaux de l’OMS,
Parce que le législateur ne peut plus rester sourd à la douleur des parents en ne protégeant pas mieux sur le plan pénal le bébé à naître (alors qu’il a su évoluer sur le plan civil),
Parce que le décès de la petite Jade, nous rappelle celui de Solin-Hazal lors de l’affaire Palmade, démontrant que de tels événements peuvent se répéter et frapper plusieurs familles en l’espace de seulement quelques jours,
Il est urgent que la loi soit revue et que l’homicide routier d’un foetus – sous les réserves émises plus haut - puisse être prononcé.